Je n’aime pas du tout les hôpitaux, ni aller chez le médecin, cela me stresse. Le pire ce sont les salles d’attente. En effet, je suis obligée de rester en place et il m’est simplement impossible d’attendre passivement. Il y a ceux qui lisent, des lecteurs de magazines plutôt que de livres, il y a ceux qui cherchent le regard de quelqu’un pour peut-être oser échanger, et il y a ceux qui vagabondent dans leurs rêves ou leurs inquiétudes, mais la plupart ont les yeux collés à leur portable, le regard vide. Les écrans aident aussi à nous vider de l’incertitude et attendre passivement que les changements se réalisent.
Et au contraire, je patiente parfaitement le temps de concoction d’un ragoût ou face au réveil de la vie d’un noyau d’avocat, d’une graine. J’attends en place lorsqu’un conférencier se prépare avant son exposé, je ne désespère pas pour la sortie d’un film ou d’un album, ou pour retrouver les personnes que j’aime après le confinement. Le fait d’être ou pas patiente chez moi réside dans la présence ou l’absence d’un interlocuteur direct ou indirect avec qui échanger, ou faire une connexion pendant le processus de métamorphose. Par exemple, les arômes et parfums qui s’échappent du ragoût sont une sorte d’invitation à attendre, à patienter et lorsque je les aperçois, je comprends que l’attente me donne l’opportunité d’apprécier une transformation en marche.
Mais s’il n’y a pas d’interlocuteur avec qui échanger ?
Face à l’absence d’un interlocuteur, j’écris.

Écrire
Écrire est un bon exercice pour organiser ses idées, ne pas se perdre, trouver un fil directeur, trouver du sens. Écrire est aussi une façon de s’exprimer comme les tableaux de Pollock, où la peinture jaillit de manière désordonnée, chaotique et impétueuse. Et le spectateur doit trouver une interprétation et il n’y en a pas qu’une. Face à l’incertitude que nous vivons, je cherche à mieux comprendre. Evidemment je n’y arrive pas toujours. Mes connaissances en matière de « gestion de crises » sont nulles. Néanmoins, vous partager mes questionnements bien que confus, m’est apparu nécessaire. Peut-être feront-ils écho aux vôtres?
There is a sign on the wall
but she wants to be sure
cause you know sometimes
words have two meanings
Stairways to heaven – led zeppelin

Méthode : progressive
En ce moment plutôt sombre, on nous demande de patienter et on entend de beaux discours sur divers sujets. Plus j’entends les annonces des autorités et plus j’ai l’impression qu’elles ne sont pas adaptées à la réalité que nous (ma famille est moi) vivons. Je sais, je devrais m’habituer à ces types de déclarations – vides de réalisme. Sauf que les circonstances devraient obliger les politiques à mieux maîtriser cet exercice de communication.

Temps de s’impatienter
Les préoccupations de parents sont très diverses, la palette est large : des questionnements profonds à ceux plus concrets. Par exemple, sur l’opportunité pour redéfinir l’école, la date précise d’un retour, combien d’enfants par groupes de classe et leur profil, sur les sens du « progressivement », sur les mesures de protection pour la prévention (notamment le port du masque), sur l’adaptation du fonctionnement de la cantine. Les réponses concrètes manquent, je sais qu’il faudra être patient, il faudra du temps pour avoir des réponses de la part des autorités.

Je comprends parfaitement que le ministère de l’éducation ait besoin de temps pour concrétiser un plan, cela évitera des précipitions dans la prise de décisions. Je comprends aussi qu’il faudra du temps pour le mettre en place au niveau des communes et localement, et du temps pour ensuite relayer les informations aux parents à travers le corps enseignant. Et encore, les enseignants au front de la bataille.

Plus important, les enfants auront besoin de temps pour assimiler la situation – comme nous tous. Pour l’instant, ils sont dans une petite bulle protectrice – pour la plupart. Le retour à l’école n’est pas le retour après les vacances. L’école a changé, elle n’est plus la même et ils ont aussi besoin de temps pour apprendre les règles imposées. Cette fois-ci, ce n’est pas pour apprendre l’importance des règles mais il faudra les appliquer, nos vies et celles des autres en dépendent.

Le côté virtuel de l’école
Tout reste virtuel pour eux, les enfants ont besoin de quelque chose de plus concret, je sais que cela est difficile à faire. Nos enfants ont besoin de se rappeler la cour de récréation, la salle de classe, la cantine, leurs camarades, même ceux qui ne sont pas leurs copains. Est-ce que leur meilleure copine ou meilleur copain sera dans le même groupe de classe ? Il faudra aussi nous occuper des conséquences émotionnelles chez nos enfants, provoquées par ces changements.
Ce que nos enfants ont appris sur le « vivre ensemble » est à reconstruire.

Anticipation
Entre temps, on continue « normalement » dans la continuité pédagogique et les apprentissages et les inégalités se creusent.
Alors, comme moi, il y a des mamans qui imaginent quelques scénarios catastrophiques, pour anticiper et éviter que les différences soient moins importantes. Je suis maman d’enfant porteur d’autisme et l’anticipation est la clé lorsqu’on est confronté à des situations anxiogènes. Les conditions pour reprendre l’école ne sont pas connues, alors comment les préparer ? On pourrait se mettre à fabriquer des masques à la maison, pour mieux patienter.

Cas particulier … parmi d’autres
Pour mon fils en élémentaire, la maison est son élément, alors il est heureux. Il a complètement coupé le lien avec l’école. Il ne veut plus jamais rien savoir de l’école, il ne veut plus rien savoir des leçons, ni de flashmob…et bizarrement il a fait des progrès : il a commencé à lire à voix haute, petite victoire du confinement.
Mon fils en maternelle aime l’école, il a envie d’y retourner pour revoir la maîtresse et ses copains. Comment lui expliquer que peut-être ils n’y retourneront pas ? Je lui ai parlé des gestes barrières et apparemment il a compris, sauf que l’autre jour quand nous avons croisé le facteur (pour une petite sortie en bas de l’immeuble), il voulait s’approcher comme d’habitude.

Beaucoup de parents ne souhaitent pas renvoyer leurs enfants à l’école. Mes échanges avec d’autres parents me montrent que la palette des questionnements est riche en couleurs et en intensités du côté des parents et leur unique interlocuteur : l’enseignant. Ces derniers ont déjà fait beaucoup et ils continuent à le faire. Ce sont eux à la fin qui vont donner du sens à la méthode progressive.
En attendant, si cela vous inspire, n’hésitez pas à échanger avec nous sur la page Facebook de L@ Petite Gazette.
** Je remercie les parents pour leurs échanges.
Rédigé par Selene