Afin de comprendre les bienfaits et possibles méfaits des activités extrascolaires , nous sommes allées à la rencontre d’Emilie JACQ, cofondatrice de l’école de danse Coté Canal à Toulouse, pour échanger sur le sujet.
La rentrée à l’école d’un enfant apporte son lot d’interrogations parmi lesquelles celle de la pratique d’une activité extrascolaire. De multiples questions peuvent alors surgir : à partir de quel âge? Quel type d’activité dois-je choisir pour mon enfant? Est-ce au parent de choisir? Est-ce primordial pour sa construction? Si ces questions sont plurielles, elles se conjuguent également avec des sujets faisant la une des périodiques et ouvrages de l’enfance et de sa psychologie : l’enfant doit s’ennuyer, attention à la surcharge mentale de l’enfant (Parentalité : La charge mentale des enfants… et si nous étions trop exigeants ?)…
Par ailleurs, la pratique d’une activité extrascolaire doit souvent se combiner aux emplois du temps, aux contraintes professionnelles, personnelles et financières des parents et peut ainsi être source de tension pour l’ensemble de la famille.
En ce début d’année scolaire, que penser des activités extrascolaires ?
La pratique sportive ou artistique d’un enfant participe à la construction de son identité, elle lui permet de s’épanouir et de développer sa confiance en lui.
Les activités extrascolaires, indépendamment du caractère de l’enfant, l’accompagnent dans son évolution, pouvant l’aider à se canaliser, à se dépenser ou à s’exprimer.
En outre, elles sont un vecteur de socialisation en ce sens que l’enfant va ainsi découvrir son identité personnelle et son identité sociale.

Les activités extrascolaires peuvent alors permettre de mettre en jeu ce qu’Howard Gardner a appelé « les intelligences multiples » (un article sur le sujet est en préparation). Ainsi pour exemple, un enfant rencontrant des difficultés à l’école, par la pratique d’une activité extrascolaire qu’il affectionne et dans laquelle il se sent bien, gagne de la confiance en soi et peut s’épanouir.
Une activité bien menée, quelle qu’elle soit, est une fenêtre sur le monde. L’enfant, en sortant de son cadre habituel, prend conscience de son potentiel et découvre ce qu’il est capable de réaliser.
En définitive, la pratique d’activités amène les enfants à façonner leur personnalité et à intégrer des valeurs. Elles sont pour cela bénéfiques d’un point de vue cognitif, physique, culturel et social.
Cependant la pratique d’une activité extrascolaire met les parents face à deux problématiques majeures: celle du nombre et celle du coût financier.
Fréquence
Concernant le nombre d’activités que l’enfant peut pratiquer il n’y a pas consensus en la matière. Si les professionnels de l’enfance recommandent une seule activité n’excédant pas 45 minutes pour un enfant de 3 à 6 ans et deux activités à partir de l’école primaire, la réalité est loin d’être aussi manichéenne. Le rythme de l’enfant et sa capacité à suivre une ou plusieurs activités est propre à chacun. Il est essentiel que le parent prenne en compte ce paramètre dans la pratique.
Pour exemple, l’enfant peut être attiré par de multiples activités, le foot, la musique et le dessin. Pour autant sera t-il en mesure de supporter le rythme de trois cours par semaine en plus de l’école? L’enfant vous répondra très certainement par l’affirmative, animé par son envie d’apprendre et sa curiosité. S’il ne faut les réprimer, il faut pouvoir les combiner avec la réalité de son développement et ce afin d’éviter au fil de l’année une certaine lassitude voire un abandon d’une des activités. Il peut être utile de faire des cours d’essais sur deux ou trois semaines pour chacune des activités afin de voir d’une part si l’enfant s’épanouit dans celle-ci, puis d’autre part d’appréhender la fatigue que cela peut engendrer et ses conséquences (irritabilité, pleurs, colères, manque d’attention…).
Coût financier
L’autre point essentiel est sans nul doute le coût financier des activités extrascolaires. Selon le rapport 2018 du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), 84 % des enfants les plus favorisés en pratiquent au moins une, alors qu’ils ne sont plus que 32 % dans les milieux plus populaires. C’est une autre réalité à laquelle chaque parent est confronté, si la pratique d’une activité sportive ou artistique engendre un coût organisationnel elle impacte également le budget familial.
Si les structures municipales (MJC, maison de quartier, école municipale ou conservatoire) pratiquent des tarifs proportionnels aux revenus des parents, ces dernières sont très prisées d’une part et d’autre part peuvent tout de même représenter un coût important pour des familles aux revenus modestes, qui plus est s’il y a une fratrie. A été mis en place cette année le pass sport pour une prise en charge à hauteur de 50 euros pour l’inscription à une activité sportive entre le 1er juillet 2021 et le 31 Octobre 2021. En dehors de ce pass, la CAF a mis en place les coupons « Activ + » permettant de financer une partie du coût des activités. Ces coupons doivent être présentés au prestataire (ayant conclu une convention avec la CAF) comme moyen de paiement pour les frais d’inscription, de licence et de participation aux différentes activités proposées, dans la limite de 80 % de leur coût total.
Un moment de plaisir avant tout
Si les bienfaits de la pratique d’une activité culturelle et sportive sont actés, dans quelle mesure de telles activités pourraient alors être néfastes pour un enfant ?
La pratique d’une activité extrascolaire apparaît comme un moment de plaisir sortant du carcan familial et scolaire, elle transmet également une discipline avec des règles à suivre. Si l’activité doit se faire sans pression, elle n’est pas non plus sans contraintes. Il est donc fondamental de l’expliquer à l’enfant qui pourrait concevoir cette activité comme une contrainte supplémentaire.

Nombreux psychologues et pédopsychiatres alertent par ailleurs sur la surstimulation des enfants, qui « courent après les activités », accompagnant parfois une course à la réussite, les parents désirant donner à leurs enfants le plus d’atouts possibles pour « performer » dans la vie. C’est dans ce contexte que peuvent émerger des méfaits dans la pratique des activités extrascolaires.
D’une part, la fatigue engendrée par une concentration et un cumul d’activités peut porter préjudice à l’enfant. En effet, ce dernier, en pleine construction, n’est pas en mesure de gérer l’ensemble des informations du fait de la non maturation de son cerveau (28/11/2019 – Education positive : la rencontre des Neurosciences et de la pédagogie, Parentalité : La charge mentale des enfants… et si nous étions trop exigeants ?). D’autre part, la pratique d’une activité se doit d’être une source de plaisir et d’un choix de l’enfant, et non la projection d’ambitions inachevées des parents qui par effet miroir pensent se réaliser au travers de leurs enfants. Inscrire son enfant dans une activité qu’il n’aurait pas choisi réduit en une peau de chagrin l’identité personnelle de l’enfant. La pratique sportive ou artistique de l’enfant ne sera dans ce cas que le prolongement des rêves inaboutis de ses parents, et parfois le fruit de frustrations, pouvant mener à un certain âge à un rejet total de l’activité voire une opposition.
Ainsi si la pratique d’une activité extrascolaire participe à la construction et l’épanouissement de l’enfant, elle doit avant tout répondre à l’affirmation de ses propres choix.
Je me suis adressée à une professionnelle du monde de la danse afin d’échanger avec elle sur la pratique d’activités extrascolaires.
Interview
Côté Canal c’est une histoire de famille qui prend son envol dans un pas de deux mené par Emilie et Charlotte Jacq. Toutes deux passionnées de danse dès leur plus tendre enfance, elles suivent une formation danse-études, auditionnent dans différents pays, intègrent des compagnies de renommées internationales puis décident de créer leur école. Celle où petits et grands peuvent s’adonner à cette pratique artistique aux multiples valeurs humaines, physiques, psychologiques. C’est avec un immense plaisir et un grand honneur que j’ai eu la chance d’interviewer l’une de ses fondatrices : Emilie Jacq.

Q1 : Aujourd’hui encore plus qu’hier, du fait de la pandémie, les spécialistes de l’enfance alerte sur les conséquences psychologiques de la privation pour les enfants de leur activité extrascolaire. Que peut selon vous apporter la pratique d’une activité en dehors de l’école et du cercle familial, et en particulier de la danse ?
La pratique d’une activité en dehors de l’école et de la bulle familiale est très intéressante pour l’enfant car celui-ci va découvrir et s’adapter par lui-même à de nouvelles situations, réagir de façon personnelle aux sollicitations proposées dans le cadre sportif et ou artistique en toute liberté .
Ainsi, au fur et à mesure de ses découvertes et expériences, il va forger ses propres goûts, affiner sa personnalité et s’affirmer dans sa pratique, ce qui renforce la confiance en soi, l’ouverture aux autres et au monde.
La danse est particulièrement riche en cela et apporte une large palette de nuances sensorielles et contribue au développement de l’enfant. Il va ainsi se confronter à une variété de sensations et perceptions grâce au mouvement, à la musique, au groupe dans lequel il va évoluer, guidé par son professeur autant artiste qu’athlète dans le cadre de la danse.
Q2 : Pour vous qu’est-ce qui doit motiver le choix d’une activité extrascolaire ?
Pour les enfants les plus jeunes deux cas de figures peuvent se présenter : soit l’enfant est dans l’affirmation précoce d’un désir pour une activité (en cela il faut de toute évidence accéder à sa motivation); soit il n’éprouve pas d’envie spécifique et le parent doit donc commencer, grâce aux livres, sorties et découvertes culturelles, à proposer à l’enfant un « champ des possibles » qui serait en accord avec sa personnalité.
Pour l’enfant plus grand, un dialogue peut s’établir et le parent peut alors déceler des indices récurrents lors de ces discussions pour orienter l’enfant vers une activité qui lui permettra de s’épanouir et de se réaliser.
Q3 : La danse, subit depuis toujours, de nombreux clichés : compétition, mauvais esprits, que pour les filles… Clichés pouvant alors inquiéter certains parents de la pratique d’une telle activité pour leurs enfants. Que répondez-vous à cela ?
Comme évoqué précédemment, l’enseignement de la danse nécessite de la rigueur et de la persévérance. C’est devenu une pratique que je pourrais presque qualifier de « vintage » quand on la compare à ces nouvelles activités souvent hybridant plusieurs pratiques de base comme la danse.
Danse classique décomplexée, non académique, tribal jazz, street afro dance… De nombreux concepts pouvant cacher un professeur non formé, non diplômé, autodidacte… et malheureusement on découvre lors d’un déménagement et d’un changement de professeur ou d’école que l’enfant n’a finalement pas appris grand-chose et doit repartir à zéro et c’est souvent décourageant.
Outre cela si on se projette dans une pratique ultérieure… De nombreux adultes continuent depuis l’enfance à venir au cours de danse (ou faire un tennis avec des amis…) et ces activités qui semblaient être moins innovantes, sont en vérité des essentiels, des basiques que l’on a la possibilité de pratiquer avec plaisir et longtemps après l’enfance.
La danse a cela de magique qu’elle apporte un plaisir universel et peut contenter chaque âge selon sa maturité au-delà des clivages sociaux, ethniques, physiques….

Q4 : De nombreux enfants subissent leurs activités extrascolaires du fait de leur multiplication ou d’un choix qui n’est pas le leur, mais plutôt celui d’un parent qui veut que son enfant réussisse là où il a échoué ou qui se réalise au travers de son enfant. Qu’en pensez-vous ?
A l’école de danse Côté Canal est proposé un large choix pour l’enfant, adapté à son âge. Brûler les étapes mène à des frustrations et à des abandons. Du côté des parents la régularité du cours va permettre de ritualiser ce moment dans la semaine et c’est d’autant plus important que l’enfant est jeune. Parfois l’enfant ne souhaite pas assister à son cours de danse malgré son désir en début d’année, l’explication est multiple… Mais souvent l’enfant a des difficultés avec la transition et refuse le cours de danse et donc quitte l’activité qu’il est en train de faire… Une fois dans le mouvement, le groupe et la musique allumée le problème s’évanouit de lui-même et souvent il ne veut pas partir en fin de séance .
Permettre à son enfant de venir à son activité sereinement est une clé, lui en parler le matin si il est en maternelle et début de primaire, s’intéresser si il est plus âgé le soir à son retour à la maison va le valoriser quelle que soit l’activité.
Nous proposons des inscriptions courtes durées de trois mois qui n’engagent pas les parents sur l’année et permettent une découverte en toute tranquillité et sans pression.
Il sera toujours possible à l’issue de cette période de partir sur une durée plus longue et pourquoi pas de renouveler les années suivantes.
Parfois le jeune danseur ou la jeune danseuse rencontre un plateau dans sa progression, une fatigue avec la croissance, et c’est normal! Il suffit d’accepter que la danse est le reflet de la vie. Il y a des moments de plateaux et d’autres moments où l’on passe des cap et ce parallèle est intéressant pour un enfant à vivre car il le prépare à la vraie vie, les succès, les échecs, l’effort, la persévérance…
Q5 : En ce qui concerne les activités extrascolaires, et particulièrement celles des enfants, vous exercez dans un domaine « hypra concurrentiel », en quoi vous distinguez-vous des autres écoles ?
Chez Côté Canal l’accent est mis sur une pratique respectueuse du rythme de l’enfant, chacun apprend à son rythme sans pression mais avec le soutien du professeur.
Chaque intervenant diplômé d’Etat a la capacité de valoriser les succès et nous croyons que c’est parfois en se trompant que l’on avance, que l’on gagne en expérience et que le succès est finalement une question de temps, chaque élève ayant son propre tempo d’apprentissage .
L’école de danse part du principe suivant : toujours intransigeant sur la qualité de la transmission mais avec une souplesse essentielle pour accompagner une petite personne en devenir.
L’époque du bâton en danse classique par exemple est révolue, même si parfois la contrainte d’une tenue (pour bien visualiser le corps et son alignement), de la coiffure (pour le travail de la tête et du regard), du respect de l’adulte, du groupe et de soi-même restent primordiales au sein de l’école de danse.
Nous mettons également l’enfant dans un contexte d’apprentissage optimal (plancher et tapis de sol nouvelle génération pour préserver les articulations), sol plane et sans piliers, large espace clair, hygiène parfaite en ce temps de pandémie, effectif limité .
Q6 : Pour clôturer cet interview, si vous deviez définir la danse
La danse est magique car elle permet de travailler la force, la grâce, la souplesse, l’endurance, la vélocité, la mémoire, la coordination, le sens du rythme, l’écoute de l’autre et permet d’habiter la plus jolie maison: son corps!…
L’école de danse Côté Canal propose des cours adaptés par tranche d’âge, pour respecter les différences entre les enfants .Eveil pour les plus jeunes, puis initiation. Ensuite début de technique jazz ou classique à partir de 7/8 ans (possibilité de suivre les deux cours) et cela continue jusqu’à l’âge adulte avec de nombreux niveaux et horaires proposés pour continuer à respecter le niveau de chacun et évoluer sereinement…
Il est également possible de compléter sa pratique de la danse avec des cours de barre au sol et pilates pour les adultes , ainsi que des cours de danse contemporaine…
Par ailleurs des master classes avec des intervenants faisant référence dans le monde de la danse sont proposées régulièrement et un beau projet clôture la fin de l’année…faisant découvrir à chacun le frisson de la scène …
Le site de l’école de danse Côté Canal:
Instagram de Côté Canal: cotecanalecoldedanse
Facebook de Coté Canal: Ecole de Danse Côté Canal Toulouse
Youtube: https://www.youtube.com/user/COTECANAL/playlists
Le podcast Porté créé par Charlotte Jacq, l’autre créatrice de l’école et disponible sur toutes les plateformes

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